Dysfonctionnement du nœud sinusal (DNS) et syndrome du sinus malade (SSM)
Dysfonctionnement du nœud sinusal et syndrome du sinus malade
Le dysfonctionnement du nœud sinusal est un terme générique désignant l’ensemble des affections altérant l’automaticité du nœud sinusal ou entravant la conduction de l’influx électrique vers les oreillettes. La perturbation de cette automaticité, ou le blocage de la conduction, se traduit par des troubles du rythme caractéristiques de ce syndrome. Les entités cliniques regroupées sous l’appellation de dysfonctionnement du nœud sinusal comprennent notamment :
- La bradycardie sinusale se définit, au sens strict, comme une réduction de l’automaticité du nœud sinusal.
- Incompétence chronotrope : incapacité du nœud sinusal à accroître de manière appropriée sa fréquence de décharge en réponse à un stimulus physiologique, tel qu’un effort physique.
- Arrêt sinusal et pause sinusale : interruption transitoire de l’activité de dépolarisation du nœud sinusal, se manifestant par une absence temporaire de génération et de conduction des impulsions électriques auriculaires.
- Bloc sino-auriculaire : trouble de la conduction cardiaque caractérisé par un retard ou une interruption de la transmission de l’influx électrique du nœud sinusal vers le myocarde auriculaire.
L’ensemble de ces situations cliniques a été examiné en détail dans les sections précédentes.
Le dysfonctionnement du nœud sinusal peut se manifester selon l’une des quatre entités cliniques précédemment décrites. La majorité des patients présentent des symptômes, bien que certains puissent demeurer asymptomatiques. Les manifestations cliniques les plus fréquentes incluent une fatigue persistante, des vertiges, une dyspnée, des épisodes de présyncope ou de syncope, ainsi qu’une diminution de la tolérance à l’effort. Lorsque ces symptômes sont associés à des anomalies électrocardiographiques évocatrices d’un dysfonctionnement du nœud sinusal, le diagnostic de syndrome du sinus malade doit être envisagé.
Causes de la dysfonction du nœud sinusal
Les différentes étiologies ont été abordées en détail dans chacun des chapitres correspondants et sont résumées ci-dessous à titre de synthèse.
Causes réversibles de la dysfonction du nœud sinusal
- Maladie dégénérative du nœud sinusal, le plus souvent liée au vieillissement, caractérisée par une fibrose progressive du tissu nodal.
- Ischémie myocardique et infarctus du myocarde
- Périmyocardite
- Effets indésirables des principaux médicaments antiarythmiques et cardiovasculaires, notamment le diltiazem, le vérapamil, les bêtabloquants, les digitaliques, l’amiodarone, la clonidine et la procaïnamide.
- Hypoxie
- Hyperkaliémie.
- Hyperthermie.
- Augmentation de la pression intracrânienne.
Causes irréversibles de la dysfonction du nœud sinusal
- Fibrose myocardique dégénérative liée au vieillissement physiologique
- Ischémie myocardique et infarctus du myocarde
- Lésions cardiaques secondaires à une intervention chirurgicale.
- Myocardite
- Maladies du tissu conjonctif (collagénopathies)
- Amyloïdose cardiaque.
Risque de tachyarythmies supraventriculaires (TSV)
Le dysfonctionnement du nœud sinusal est également associé à un risque accru de tachyarythmies supraventriculaires, en particulier la fibrillation auriculaire et le flutter auriculaire. Lorsqu’il s’accompagne d’une tachyarythmie supraventriculaire, on parle de syndrome tachy-brady, caractérisé par l’alternance d’épisodes de bradycardie et de tachycardie.
Prise en charge du syndrome du sinus malade et, plus largement, des bradycardies.
Le syndrome du sinus malade, lorsqu’il est secondaire à des lésions irréversibles, constitue une affection évolutive nécessitant une prise en charge spécialisée. L’implantation d’un stimulateur cardiaque permanent demeure le traitement de référence. En présence d’une tachyarythmie associée, la stimulation cardiaque permet l’administration de doses optimales — éventuellement élevées — de médicaments à effet bradycardisant, tels que les bêta‑bloquants, sans risque d’aggravation de la bradycardie.
Chez les patients présentant un syndrome du sinus malade, l’implantation d’un stimulateur cardiaque permanent est indiquée afin de soulager les symptômes et d’optimiser la fonction hémodynamique. Il convient toutefois de rappeler qu’une bradycardie d’origine nodale sinusale est rarement responsable d’un décès prématuré. Par ailleurs, l’éventuelle association entre les épisodes transitoires d’asystolie auriculaire observés dans la bradycardie sinusale et une augmentation du risque thromboembolique demeure, à ce jour, non démontrée.
La prise en charge par stimulation cardiaque à l’aide d’un stimulateur cardiaque (pacemaker) est traitée dans un chapitre distinct.
Prise en charge de la bradycardie, quelle qu’en soit l’étiologie.
Les bradycardies d’origine bénigne (physiologiques) — telles que celles observées lors d’une réaction vasovagale ou chez les athlètes entraînés — ne nécessitent généralement aucun traitement. En cas de doute quant au caractère physiologique de la bradycardie, un enregistrement Holter ECG (monitorage ambulatoire) est recommandé. Lorsque des effets indésirables médicamenteux sont suspectés, il convient d’évaluer avec rigueur le rapport bénéfice/risque entre l’interruption du traitement et l’implantation d’un stimulateur cardiaque permanent, afin de permettre la poursuite de la thérapie. Il est fréquent que des patients présentant une bradycardie aient une indication formelle pour des médicaments susceptibles d’aggraver ou de déclencher cette bradycardie ; dans ce contexte, l’implantation d’un stimulateur cardiaque permanent représente généralement une stratégie fondée sur des données probantes, permettant de maintenir un traitement médicamenteux indispensable.
La bradycardie, quelle qu’en soit l’étiologie, peut être prise en charge en suivant l’algorithme présenté ci‑après :
- Interrompre ou adapter les traitements médicamenteux susceptibles d’induire ou d’aggraver une bradycardie.
- En cas de bradycardie aiguë avec retentissement hémodynamique : (1) l’administration intraveineuse de 1 à 2 ml d’atropine à 0,5 mg/ml constitue le traitement de première intention et peut être répétée si nécessaire. (2) En cas d’inefficacité ou de nécessité de réinjections fréquentes, une perfusion d’isoprénaline est indiquée : diluer une ampoule de 5 ml (0,2 mg/ml) dans 245 ml de solution glucosée à 50 mg/ml, avec une posologie initiale de 0,01 μg/kg/min, à ajuster progressivement jusqu’à obtention de l’effet clinique recherché. (3) Si l’atropine et l’isoprénaline demeurent inefficaces, une stimulation cardiaque transcutanée (externe) peut être mise en œuvre ; la plupart des défibrillateurs modernes disposent de cette fonction. Cette technique est utilisée en attendant l’implantation d’un stimulateur cardiaque permanent. (4) Une alternative consiste en une stimulation cardiaque transveineuse temporaire, également indiquée en relais jusqu’à la mise en place d’un stimulateur permanent.
- Traitement permanent : Les bradycardies symptomatiques persistantes justifient l’implantation d’un stimulateur cardiaque permanent. Les patients présentant une incompétence chronotrope peuvent nécessiter ce dispositif afin d’améliorer leur tolérance à l’effort et de réduire la symptomatologie. Ceux atteints d’un syndrome tachycardie–bradycardie peuvent également bénéficier d’un traitement médicamenteux visant à contrôler la fréquence cardiaque (par exemple par l’administration de bêta‑bloquants), ainsi que d’une anticoagulation en cas de fibrillation auriculaire ou de flutter auriculaire documenté.
Chez les patients présentant une bradycardie secondaire à une ischémie myocardique ou à un infarctus du myocarde, un traitement n’est indiqué que si le débit cardiaque est compromis ou si la bradycardie favorise la survenue d’arythmies plus graves ; l’algorithme décrit précédemment s’applique également à cette situation.
Il convient de rappeler que la bradycardie secondaire à une ischémie ou à un infarctus de la paroi inférieure est, dans la majorité des cas, transitoire et ne requiert qu’exceptionnellement l’implantation d’un stimulateur cardiaque permanent. En revanche, les infarctus de la paroi antérieure s’accompagnent plus fréquemment d’une bradycardie persistante, justifiant le plus souvent la mise en place d’un stimulateur cardiaque définitif. Pour des informations détaillées, se reporter à la section consacrée aux troubles de conduction liés à l’ischémie et à l’infarctus.