Élévation du segment ST dans l’ischémie myocardique aiguë et diagnostics différentiels
Le sus-décalage du segment ST dans l’ischémie myocardique aiguë
Les élévations du segment ST avec un segment ST droit (horizontal, ascendant ou descendant) ou convexe suggèrent fortement une ischémie transmurale aiguë (figure 1 A). Les élévations concaves du segment ST, en revanche, sont beaucoup moins susceptibles d’être causées par une ischémie (figure 1 B). C’est ce qu’indiquent les lignes directrices nord-américaines et européennes. Cependant, un segment ST concave n’exclut pas l’ischémie, il réduit simplement la probabilité que l’ischémie soit la cause sous-jacente. Les élévations concaves du segment ST sont en fait très courantes dans la population (voir ci-dessous). Étudier la figure 1 avec soin.
Critères actuels des lignes directrices pour le sus-décalage ischémique du segment ST:
Nouveaux sus-décalages du segment ST dans au moins deux dérivations anatomiquement contiguës :
– Hommes âge ≥40 ans: ≥2 mm dans V2-V3 et ≥1 mm dans toutes les autres dérivations.
– Hommes âge <40 ans: ≥2,5 mm dans V2-V3 et ≥1 mm dans toutes les autres dérivations.
– Femmes (tout âge): ≥1,5 mm dans V2-V3 et ≥1 mm dans toutes les autres dérivations.
– Hommes & ; femmes V4R et V3R: ≥0,5 mm, à l’exception des hommes <30 ans chez qui le critère est ≥1 mm.
– Hommes & femmes V7-V9: ≥0,5 mm.
Les élévations du segment ST en cas d’ischémie sont dynamiques. Un patient peut initialement présenter des élévations du segment ST qui ne remplissent pas les critères ECG, puis développer de magnifiques élévations du segment ST quelques minutes plus tard. En effet, un segment ST dynamique (variable) est évocateur d’une ischémie myocardique. Il est judicieux de connecter le patient à une surveillance continue de l’ECG (ST) afin de détecter une telle dynamique.
Élévations du segment ST avec segment ST concave
Les élévations concaves du segment ST posent un problème de diagnostic (figure 1 B). Ces élévations du segment ST sont extrêmement fréquentes dans toutes les populations. Ils se produisent chez les jeunes, les personnes âgées, les individus en bonne santé et les malades. Par exemple, environ 90 % des hommes âgés de 30 ans présentent des élévations concaves du segment ST dans les dérivations V2-V3. Cela explique pourquoi les directives exigent des élévations plus importantes du segment ST dans ces dérivations (voir les critères ci-dessus). Il faut cependant être prudent. Il existe de nombreux cas d’ischémie transmurale présentant des élévations concaves du segment ST. De plus, le segment ST peut avoir une apparence concave si l’onde T est proéminente (comme dans les cas d’hyperkaliémie, de repolarisation précoce ou même de phases précoces d’ischémie). En conclusion, les élévations concaves du segment ST sont atypiques de l’ischémie, mais elles n’excluent pas l’ischémie.
Autres caractéristiques des élévations ischémiques du segment ST
Dans le STE-ACS (STEMI), le niveau du point J est généralement proche du niveau de l’apex de l’onde T (c’est-à-dire que la différence de hauteur entre le point J et l’apex de l’onde T est généralement faible). En outre, les élévations du segment ST ischémique s’accompagnent généralement de dépressions réciproques du segment ST. Ces dépressions du segment ST sont des images miroir des élévations du segment ST et sont observées dans les dérivations avec un angle à peu près opposé à celui des dérivations avec élévations du segment ST. Il est important de noter que les dépressions réciproques du segment ST suggèrent fortement une ischémie transmurale. Ceci est également cohérent avec la théorie du vecteur ; un sus-décalage dans une dérivation devrait être enregistré comme une dépression dans une dérivation avec un angle d’observation opposé. Cependant, les dépressions réciproques du segment ST peuvent être absentes. Il y a trois explications à l’absence de dépressions réciproques du segment ST :
- Il n’y a pas de dérivation ECG avec l’angle d’observation opposé.
- Les courants de lésion ne sont pas assez forts pour être détectés sur des fils dont les angles d’observation sont opposés.
- D’autres vecteurs peuvent interférer avec les courants de lésion, et les empêcher d’être détectés par des sondes ayant des angles d’observation opposés.
L’évolution électrocardiographique naturelle du STE-ACS (STEMI)
La figure 2 présente l’ensemble de l’évolution électrocardiographique (ECG) dans le cas d’un STE-ACS/STEMI. Il convient de noter qu’un patient souffrant d’un STEMI peut se présenter au cours de n’importe laquelle des phases illustrées dans cette figure, raison pour laquelle il convient de l’étudier en détail.
Les pièges
L’ischémie transmurale aiguë située dans les parties basales de la paroi latérale du ventricule gauche (appelée paroi postéro-latérale) n’entraîne pas d’élévation du segment ST sur l’ECG conventionnel à 12 dérivations, tout simplement parce qu’aucune des dérivations n’est capable de détecter ces courants de lésion. Au lieu de cela, des dépressions réciproques du segment ST apparaissent dans les dérivations thoraciques antérieures (V1-V3). De même, l’ischémie transmurale aiguë localisée dans le ventricule droit passe souvent inaperçue lorsque l’on utilise uniquement les dérivations standard. Pour y remédier, il est possible de connecter les dérivations thoraciques droites V4R et V5R. Pour plus de détails, voir STEMI (STE-ACS) Sans élévation du segment ST.
Diagnostics différentiels des sus-décalages du segment ST
Cette section est d’une importance capitale pour tous ceux qui voient des patients susceptibles d’être atteints d’une maladie cardiaque. Chaque médecin, infirmière et auxiliaire médical devrait être en mesure de différencier en toute confiance 15 causes différentes de sus-décalage du segment ST, c’est pourquoi une présentation détaillée suit. Chaque diagnostic différentiel est discuté séparément, en commençant par la forme la plus courante de sus-décalage du segment ST, à savoir le schéma homme/femme.
Modèle masculin/féminin (“élévation normale du segment ST”).
Le schéma homme/femme est de loin le type le plus courant de sus-décalage du segment ST. Il est totalement bénin et aucune étude à ce jour n’a associé ce schéma à un risque accru de mortalité cardiovasculaire ou toutes causes confondues. La prévalence a été examinée de manière approfondie chez les hommes (en particulier dans le bras américain), c’est pourquoi on l’appelle généralement “schéma masculin”, mais il est également fréquent chez les femmes. Néanmoins, les études montrent que chez les hommes âgés de 16 à 58 ans, environ 90 % présentent ≥1 mm de sus-décalage du segment ST dans ≥1 dérivation thoracique. La prévalence tombe à 30 % chez les hommes âgés de 70 ans ou plus. Chez les femmes, en revanche, la prévalence reste stable tout au long de la vie, avec un taux d’environ 20 %. C’est une erreur flagrante, mais beaucoup trop fréquente (même chez les cardiologues et les électrophysiologistes) de confondre le schéma homme/femme avec la repolarisation précoce.
Caractéristiques ECG du modèle homme/femme
Un exemple représentatif d’ECG est présenté dans la figure 4.
- Les élévations du segment ST sont les plus prononcées dans les dérivations V2-V4, où elles peuvent atteindre 3 mm, voire plus. Les femmes présentent systématiquement un sus-décalage du segment ST moins important que les hommes. Les élévations du segment ST sont moins prononcées dans les dérivations thoraciques latérales et dépassent rarement 1 mm dans les dérivations V5-V6.
- Le segment ST a un aspect concave.
- L’apex de l’onde T est nettement plus élevé que le point J.
- Plus l’amplitude du QRS est grande, plus l’élévation du segment ST est importante.
- Le schéma mâle/femelle peut également apparaître dans les dérivations des membres (en particulier II, aVF et III). Cependant, il est beaucoup moins prononcé dans les dérivations des membres (typiquement <1 mm).
Dans certains manuels, le schéma homme/femme est appelé “élévation normale du segment ST”.
Repolarisation précoce
La repolarisation précoce est une autre condition souvent mal comprise. La repolarisation précoce se produit chez 5 à 10 % des hommes (données américaines). Elle est un peu moins fréquente chez les femmes (prévalence de 2 à 4 %). Cet état est reconnu depuis des décennies et a été considéré comme une forme bénigne de sus-décalage du segment ST. Le terme “repolarisation précoce” a été utilisé pour décrire ce qui semblait être une repolarisation prématurée sur l’ECG. Comme le montre la figure 5, les élévations du segment ST sont en effet associées à ce qui semble être une interruption du complexe QRS et une initiation de la repolarisation. Cependant, aucune étude à ce jour n’a pu démontrer que la repolarisation est réellement précoce et, de plus, cette pathologie est associée à un risque 5 fois plus élevé de mort cardiaque subite. Le préfixe “bénin” ne doit donc pas être utilisé. Le risque de mort cardiaque subite est plus important si le schéma de repolarisation précoce se produit dans les dérivations du membre inférieur (II, aVF et III).
Caractéristiques ECG de la repolarisation précoce
- Les élévations du segment ST sont concaves et plus prononcées dans les dérivations thoraciques. Les ondes T sont de grande amplitude.
- La caractéristique d’une repolarisation précoce est l’encombrement ou l’encoche de la fin du QRS (les deux peuvent se produire sur le même ECG). L’encoche entière doit être au-dessus de la ligne de base. Le flou doit commencer avant que la ligne de base ne soit atteinte. Voir la figure 5, panneau A.
- Les termes Jonset, Jpeak, Jtermination (Figure 5, panneau A) décrivent le ralentissement et l’encoche de fin de QRS. En cas de douleur thoracique, le niveau d’élévation du segment ST est mesuré en Jtermination.
Un récent rapport de consensus sur la repolarisation précoce (MacFarlane et al, 2016, JACC) énonce les critères suivants pour la repolarisation précoce :
- Entaille ou flèche dans la transition entre l’onde R et le segment ST. Le sus-décalage du segment ST est presque toujours présent.
- Jpeak est ≥1 mm dans au moins deux dérivations anatomiques contiguës (V1-V3 ne comptent pas).
- Durée du QRS <120 ms.
Hypertrophie ventriculaire gauche
La caractéristique de l’hypertrophie ventriculaire gauche est la grande amplitude des QRS ; de grandes ondes R sont observées en V5-V6 et des ondes S profondes en V1-V2. Des modifications secondaires du segment ST-T sont fréquemment observées en V1-V2 (élévation du segment ST) et en V5-V6 (dépression du segment ST). Voir la figure 6 pour un exemple d’ECG.
L’ECG dans l’hypertrophie ventriculaire gauche
- Grandes ondes R dans V5-V6 et profondes ondes S dans V1-V2.
- Élévations concaves du segment ST dans les segments V1 à V3. Plus l’onde S est profonde, plus le sus-décalage du segment ST est important.
- Des dépressions secondaires du segment ST sont observées dans les segments V5-V6.
Bloc de branche gauche (BBG)
L’interprétation de l’ischémie est notoirement difficile en présence d’un bloc de branche gauche (LBBB). En effet, le bloc de branche gauche provoque des altérations marquées de la dé- et de la repolarisation du ventricule gauche. Le bloc de branche gauche provoque toujours des changements ST-T secondaires proéminents qui peuvent à la fois imiter et masquer l’ischémie. Plusieurs études ont montré que la majorité des patients adressés de manière inappropriée au laboratoire de cathétérisme (pour une ICP) avec une suspicion de STE-ACS/STEMI présentent un bloc de branche gauche. Le bloc de branche gauche constitue donc un défi diagnostique.
Les premières études, qui remontent aux années 1990, ont démontré que les patients souffrant d’une gêne thoracique et d’un nouveau bloc de branche gauche qui étaient immédiatement orientés vers une ICP avaient une meilleure survie que les patients comparables qui n’étaient pas immédiatement orientés vers une ICP. Une proportion significative de ces patients présentait une occlusion totale qui pouvait être traitée par ICP. Depuis ces études, les lignes directrices recommandent que les patients présentant une gêne thoracique et un bloc de branche gauche nouvellement diagnostiqué soient immédiatement adressés au laboratoire de cathétérisme dans le but d’effectuer une ICP. Toutefois, cette procédure aboutit à l’orientation de nombreux patients qui n’ont pas besoin d’une ICP (absence d’occlusion totale de l’artère coronaire), et ce pour les raisons suivantes :
- Une proportion importante des blocs de branche gauches ne sont pas nouveaux, mais simplement nouveaux pour le système de soins de santé (par exemple, absence d’enregistrements ECG antérieurs).
- Même si le bloc de branche gauche est nouveau, l’occlusion peut ne pas être totale, auquel cas l’ICP ne confère aucun avantage en termes de survie.
Ces sujets seront abordés en détail dans le chapitre Bloc de branche gauche (BBG) dans l’infarctus aigu du myocarde et l’ischémie. Pour les besoins de cette discussion, l’accent sera mis sur les modifications ST-T secondaires causées par le bloc de branche gauche.
ECG en cas de bloc de branche gauche
- Le bloc de branche gauche provoque fréquemment des élévations du segment ST dans les dérivations V1-V2. Le sus-décalage du segment ST est généralement concave.
- Des dépressions du segment ST sont observées dans les dérivations V5, V6, aVL et I.
- Le bloc de branche gauche se caractérise par un complexe QRS large (durée du QRS ≥0,12 s), une onde S profonde dans V1-V2, une onde R large et maladroite dans V5, V6, aVL et I.
Ces modifications de l’ECG sont illustrées dans la figure 7, qu’il convient d’étudier attentivement.
Périmyocardite aiguë (myocardite)
La myocardite et la péricardite ont tendance à s’accompagner l’une l’autre, c’est pourquoi le terme de périmyocardite peut être utilisé. Cette affection peut provoquer une douleur thoracique rétrosternale sévère, très similaire à celle observée lors d’un infarctus aigu du myocarde. Elle provoque également des élévations du segment ST, mais celles-ci sont généralement faciles à différencier de l’infarctus du myocarde avec élévation du segment ST (STEMI/STE-ACS). Les élévations du segment ST dans la périmyocardite sont généralisées, ce qui signifie qu’elles se produisent dans la majorité des dérivations de l’ECG. Ceci est très inhabituel dans le cas d’un STEMI/STE-ACS, dans lequel les élévations du segment ST sont confinées à la zone myocardique ischémique (qui dépend elle-même du site de l’occlusion de l’artère). Dans le cas le plus classique de périmocardite, on observe des élévations du segment ST dans toutes les dérivations, à l’exception de la dérivation V1. La morphologie des élévations du segment ST rappelle une repolarisation précoce, et il peut même y avoir une encoche dans le point J. Cependant, les élévations du segment ST dans la périmyocardite dépassent rarement 4 mm (ce qu’elles peuvent certainement dépasser dans l’infarctus du myocarde avec sus-décalage du segment ST). De plus, il n’y a pas de dépressions réciproques du segment ST dans la myocardite et il n’y a jamais d’inversions de l’onde T concomitantes. En revanche, dans les STEMI/STE-ACS, les dépressions réciproques du segment ST sont typiques et il peut y avoir des inversions de l’onde T dans les mêmes dérivations montrant une élévation du segment ST.
Inversion de l’onde T peut toutefois se produire dans le cas d’une périmyocardite, mais seulement après normalisation des élévations du segment ST (c’est-à-dire que ces deux modifications de l’ECG ne se produisent pas simultanément).
Enfin, le segment PR est souvent déprimé en cas de périmyocardite. Cela peut se manifester par un segment PR en pente descendante (dans la plupart des dérivations). La seule exception est la dérivation V1, qui a tendance à présenter une élévation du segment PR.
Un exemple de périmyocardite est présenté dans la figure 8.
Hyperkaliémie
- L’hyperkaliémie peut provoquer des élévations du segment ST dans les dérivations V1-V2. Le segment ST est typiquement droit. Une hyperkaliémie prononcée peut provoquer des élévations du segment ST similaires à celles observées dans le syndrome de Brugada.
- D’autres signes d’hyperkaliémie sont également présents (complexes QRS larges, ondes T élevées, diminution de l’amplitude des ondes P).
La correction des taux de potassium sérique normalisera les modifications de l’ECG.
Syndrome de Brugada
Le syndrome de Brugada est une canalopathie rare (trouble électrique causé par une fonction anormale ou absente des canaux ioniques) qui prédispose l’individu à la syncope, aux arythmies ventriculaires malignes (tachycardie ventriculaire, fibrillation ventriculaire) et à la mort cardiaque subite. Il existe trois types de présentations ECG, appelées syndrome de Brugada de type 1, de type 2 et de type 3. La figure 10 présente des exemples d’ECG du syndrome de Brugada de type 1, 2 et 3.
Le syndrome de Brugada de type 1 est le plus typique (et le plus diagnostique). Il rappelle quelque peu le bloc de branche droit (RBBB) dans les dérivations V1-V3, mais la durée du QRS n’est pas prolongée dans les dérivations V5-V6 (ce qui n’est pas compatible avec le bloc de branche droit, dans lequel il doit y avoir des complexes QRS larges). L’élévation du segment ST a une forme bombée (souvent décrite comme une “queue de requin”) en V1, V2 ou V3. Le segment ST commence à l’apex de la deuxième onde R et est en pente descendante (panneau A, figure 10). L’onde T est négative (inversée).
Dans les syndromes de Brugada de type 2 et de type 3, le sus-décalage du segment ST est en forme de selle (panneaux B et C, figure 10). La différence entre le type 2 et le type 3 est que le sus-décalage du segment ST dans le type 2 est élevé ≥2 millimètres (il est plus faible dans le syndrome de Brugada de type 3).
Pour plus de détails, veuillez vous référer à Syndrome de Brugada.
Cardiomyopathie ventriculaire droite arythmogène/dysplasie (ARVC, ARVD)
La cardiomyopathie / dysplasie ventriculaire droite arythmogène (ARVC / ARVD) peut provoquer des élévations du segment ST en V1-V3 similaires à celles observées dans le syndrome de Brugada.
Pré-excitation et WPW (syndrome de Wolff-Parkinson-White)
La préexcitation (c’est-à-dire l’activation prématurée) du myocarde ventriculaire due à une voie accessoire entre les oreillettes et le ventricule entraîne une dépolarisation anormale des ventricules, qui conduit à une repolarisation anormale. Les modifications secondaires du segment ST-T se manifestent par des élévations et des dépressions du segment ST. La préexcitation peut également provoquer des ondes Q anormales. Voir la figure 11 pour un exemple d’ECG. Voir Pre-excitation & ; WPW (syndrome de Wolff-Parkinson-White) pour plus de détails sur les syndromes de préexcitation.
Cardioversion électrique
Des élévations transitoires (généralement quelques minutes) du segment ST peuvent suivre une cardioversion électrique. Les élévations du segment ST sont similaires à celles observées dans le syndrome de Brugada. Voir la figure 12 pour un exemple d’ECG.
Cardiomyopathie de Takotsubo (syndrome du cœur brisé, syndrome du ballon apical, cardiomyopathie induite par le stress)
La cardiomyopathie de Takotsubo est une affection aiguë plutôt inhabituelle. Elle a fait l’objet de nombreuses recherches ces dernières années. Pratiquement tous les cas de cardiomyopathie de Takotsubo surviennent dans des situations de stress extrême, telles que les accidents de voiture, la violence armée, d’autres menaces ou toute autre situation dans laquelle la vie de l’individu est (ou est perçue comme étant) en danger. La cardiomyopathie de Takotsubo est beaucoup plus fréquente chez les femmes. Le patient typique présente une douleur thoracique intense, une dyspnée et, dans certains cas, des troubles hémodynamiques. L’ECG montre des élévations localisées du segment ST, des inversions de l’onde T et parfois des ondes Q pathologiques. Les taux de troponine sont souvent élevés. La cardiomyopathie de Takotsubo ne peut donc pas être différenciée de l’infarctus du myocarde avec sus-décalage du segment ST (en dehors de l’anamnèse). Ces patients sont référés pour un cathétérisme immédiat, au cours duquel aucune occlusion coronaire ne peut être trouvée, mais l’injection de contraste révèle que la partie apicale du ventricule gauche est dilatée (d’où le terme de syndrome de ballonnement apical). Ce syndrome a été décrit pour la première fois en 1991 au Japon, et les auteurs l’ont appelé takotsubo, qui est le mot japonais pour une sorte de piège à pieuvres (le ventricule gauche prend la forme de ce piège à pieuvres).
Des études menées aux États-Unis et au Japon ont estimé que jusqu’à 2 % des patients orientés vers une ICP en raison d’une suspicion de STE-ACS/STEMI sont en fait atteints de takotsubo. Des études antérieures ont rapporté que 98 cas sur 100 se rétablissaient complètement. Des études plus récentes (Omerovic et al) ont rapporté des taux de mortalité atteignant 4%.
- 80 % des patients présentent des élévations localisées du segment ST (principalement dans les dérivations thoraciques). La morphologie des élévations du segment ST ne se distingue pas de celles observées dans les cas de STEMI/STE-ACS.
- 64 % présentent des modifications de l’onde T (principalement des inversions) accompagnant des élévations du segment ST.
- 32% ont des ondes Q pathologiques.
Voir Cardiomyopathie de Takotsubo (ballonnement apical, cardiomyopathie induite par le stress) pour plus de détails.
L’angor de Prinzmetal est causé par un vasospasme de l’artère coronaire. Le vasospasme provoque une occlusion totale de l’artèreAngine de Prinzmetal (variante de l’angine de poitrine, vasospasme de l’artère coronaire) coronaire, ce qui entraîne des élévations du segment ST. Cependant, le vasospasme et donc l’ischémie sont pratiquement toujours transitoires et disparaissent avant le développement de l’infarctus. Les élévations du segment ST sont suivies d’inversions de l’onde T qui peuvent persister pendant des jours, voire des semaines.
Embolie pulmonaire
L’embolie pulmonaire peut provoquer des élévations du segment ST en V1, V2, II, aVF et III. Cependant, la tachycardie sinusale est le signe ECG le plus courant dans les cas d’embolie pulmonaire. Parfois, le schéma S1Q3T3 peut être observé, ce qui signifie qu’il y a une onde S proéminente dans la dérivation I, une grande onde Q dans la dérivation III et une inversion de l’onde T dans la dérivation III. En outre, les inversions de l’onde T dans la dérivation V1-V3 sont fréquentes dans l’embolie pulmonaire. Enfin, un nouveau bloc de branche droit (BBD) doit toujours faire suspecter une embolie pulmonaire chez les patients souffrant de dyspnée.
Hypothermie et hypercalcémie
Ces deux conditions peuvent engendrer des ondes J (dans toutes les dérivations). Les ondes J sont également appelées ondes d’Osborn, en particulier dans le contexte de l’hypothermie et de l’hypercalcémie. Il existe cependant deux autres syndromes d’ondes J, à savoir le syndrome de Brugada et la repolarisation précoce.
Les ondes J (ondes d’Osborn) et les syndromes d’ondes J sont traités séparément.
Dissection aortique proximale
La dissection aortique peut engager le bulbe aortique (bulbus aortae) et ainsi occlure les ostiums des artères coronaires (le plus souvent l’ostium de l’artère coronaire droite). L’occlusion qui s’ensuit provoque des élévations du segment ST et une ischémie transmurale. Le pronostic de cette affection est extrêmement sombre.
Anévrisme du ventricule gauche
L’anévrisme du ventricule gauche est une complication des infarctus transmuraux (STEMI) et peut provoquer des élévations persistantes du segment ST. Ceux-ci peuvent persister pendant des mois, voire des années. Les élévations du segment ST se produisent dans les dérivations de l’ECG reflétant la zone anévrismale.