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Echocardiographie clinique

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  1. Introduction à l'échocardiographie et à l'imagerie par ultrasons
    12 Chapters
  2. Principes et calculs hémodynamiques
    5 Chapters
  3. L'examen échocardiographique
    3 Chapters
  4. Fonction systolique et contractilité du ventricule gauche
    11 Chapters
  5. Left ventricular diastolic function
    3 Chapters
  6. Cardiomyopathies
    6 Chapters
  7. Valvular heart disease
    8 Chapters
  8. Miscellaneous conditions
    5 Chapters
  9. Pericardial disease
    2 Chapters
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Cardiomyopathie ventriculaire droite arythmogène (CVDA, ARVC, ARVD)

La cardiomyopathie ventriculaire droite arythmogène (CVDA) est considérée comme une cardiomyopathie génétique qui affecte principalement le ventricule droit. La CVDA se définit par la perte progressive des cellules du myocarde, qui sont remplacées par de la graisse et du tissu fibreux. Ce processus commence dans l’épicarde et se déplace progressivement vers l’endocarde. Au fur et à mesure que le remplacement fibreux progresse, la paroi ventriculaire s’amincit et le ventricule commence à se dilater. Environ 50 % des cas présentent une cardiomyopathie biventriculaire, bien que la maladie soit moins prononcée dans le ventricule gauche. Dans de rares cas, la maladie se limite au ventricule gauche. La CVAA provoque des tachycardies ventriculaires et des arrêts cardiaques soudains ; la maladie est l’une des causes les plus fréquentes d’arrêts cardiaques soudains chez les adolescents et les athlètes(la cardiomyopathie hypertrophique est la cause la plus fréquente).

Mutations génétiques dans la CVAA

Au moins 13 gènes ont été impliqués dans la CVAA. La majorité d’entre eux sont des gènes codant pour des protéines desmosomales. Le desmosome est un composant du disque intercalaire qui relie mécaniquement et électriquement les cellules du myocarde. La plupart des mutations sont transmises de manière autosomique dominante, avec une pénétration et une expressivité variables. Il existe des formes récessives, bien qu’elles soient rares (maladie de Naxos, syndrome de Carvajal). La prévalence de l’ARVC se situe entre 0,02 et 0,05% en Europe(Corrado et al). L’ARVC est plus maligne chez les hommes, ce qui n’est pas encore expliqué.

Des mutations génétiques peuvent être confirmées chez environ 60 % des personnes atteintes de CVAA. Les mutations du gène desmosomal PKP2 sont les plus fréquentes. Les mutations dans des gènes non desmosomaux sont moins fréquentes. Les gènes suivants sont associés à l’ARVC :

Caractéristiques cliniques de la CVAA

La CVAA est typiquement cachée (asymptomatique) pendant l’enfance et l’adolescence et devient symptomatique entre la deuxième et la quatrième décennie de la vie. De même, le ventricule droit peut apparaître fonctionnellement et morphologiquement normal à l’échocardiographie et à l’IRM cardiaque au cours des deux premières décennies de la vie.

La présentation initiale la plus courante est celle de palpitations ou de syncopes. La CVAA peut toutefois provoquer une tachycardie ventriculaire, qui peut dégénérer en fibrillation ventriculaire à tout âge. L’exercice physique, ou toute autre activité provoquant une stimulation adrénergique, augmente le risque de syncope, d’arythmie ventriculaire et d’arrêt cardiaque soudain.

La CVAA peut provoquer une tachycardie ventriculaire, une fibrillation ventriculaire et un arrêt cardiaque soudain à tout âge. Des palpitations, une syncope ou un arrêt cardiaque – en particulier au cours d’une activité physique – chez un jeune adulte présentant des inversions de l’onde T en V1-V4 ou d’autres modifications de l’ECG (voir ci-dessous) doivent faire suspecter une CVAA.

La perte progressive de myocarde entraîne une dilatation ventriculaire et une insuffisance cardiaque droite. L’insuffisance cardiaque biventriculaire est moins fréquente.

ECG en cas de CVDA

  • Inversion de l’onde T dans les dérivations V1 à V4.
  • Onde d’Epsilon, une dépolarisation/potentiel tardif se produisant entre la fin du complexe QRS et le début de l’onde T, dans les dérivations V1 et V2 (figure 1).
  • Ladurée d’activation terminale (DAT), définie comme l’intervalle entre le nadir (point le plus bas) de l’onde S et la fin de la dépolarisation, est prolongée (>55 ms dans V1-V2). Voir la figure 2.
  • Une onde d’Epsilon et un TAD prolongé suggèrent fortement une CVAA.
  • Faible tension de la dérivation des membres.
  • Les patients atteints de CVRA présentent de fréquentes contractions ventriculaires prématurées (CVP), qui peuvent évoluer vers une tachycardie ventriculaire monomorphe (TV).
  • La tachycardie ventriculaire chez les patients atteints de CVDA présente une morphologie LBBB, avec des ondes T négatives dans les segments V1 à V4.
  • Les PVC et la tachycardie ventriculaire peuvent être provoquées par toute stimulation adrénergique physique, par exemple l’activité physique.
Figure 1. Epsilon wave and TAD on the electrocardiogram.
Figure 1. Onde d’Epsilon et TAD sur l’électrocardiogramme.

Échocardiographie dans la CVAA

L’échocardiographie montre une dilatation globale du ventricule droit. Le ventricule gauche et le septum sont généralement épargnés. Des anomalies régionales du mouvement de la paroi (hypokinésie, dyskinésie et kinésie) peuvent également être observées. En cas de remplacement fibro-graisseux prononcé, un anévrisme ventriculaire se développe.

L’échocardiographie étant insuffisante pour visualiser le ventricule droit, l’imagerie par résonance magnétique cardiaque (IRM) est la technique d’imagerie privilégiée. Le rehaussement tardif au gadolinium permet d’estimer le degré de remplacement fibrofatineux.

Diagnostics différentiels de la CVAR

  • TV-ROV idiopathique (tachycardie ventriculaire provenant du RVOT).
  • Sarcoïdose.
  • Cardiopathie congénitale avec charge ventriculaire droite.

Critères diagnostiques de la CVAA

Le diagnostic est basé sur les données cliniques, l’ECG, les analyses génétiques et l’IRM cardiaque. Les critères actuels (approuvés par l’ESC, l’AHA et l’ACC) utilisent des critères majeurs et mineurs, divisés en 6 catégories. En fonction des résultats, la probabilité d’une CVAA peut être classée comme possible, limite ou définitive :

  • ARVC définitif: 2 majeurs, ou 1 majeur et 2 mineurs, ou 4 mineurs de différentes catégories
  • CVDA limite: 1 majeure et 1 mineure, ou 3 mineures de différentes catégories.
  • CVDA possible: 1 majeur ou 2 mineurs de différentes catégories

Tableau 1. Critères pour la CVAA


Les catégories sont numérotées de 1 à 6.

  • CATÉGORIE 1 : Dysfonctionnement global ou régional et altération structurelle†
    • échocardiographie 2D
      • Critères majeurs: Akinésie, dyskinésie ou anévrisme régional du VR et l’un des éléments suivants (en fin de diastole) : RVOT PLAX ≥32 mm (≥19 mm par mètre carré après correction pour la surface corporelle), RVOT PSAX ≥36 mm (≥21 mm par mètre carré après correction pour la surface corporelle), ou changement de surface fractionnelle de ≤33 %.
      • Critères mineurs : Akinésie ou dyskinésie régionale du VR et l’un des éléments suivants (en fin de diastole) : PLAX RVOT 29 à <32 mm (16 à <19 mm par mètre carré après correction pour la surface corporelle), PSAX RVOT 32 à <36 mm (18 à <21 mm par mètre carré après correction pour la surface corporelle), ou changement de surface fractionnelle de 34 à 40 %.
    • IRM (Imagerie par résonance magnétique)
      • Critères principaux : Akinésie ou dyskinésie régionale du VR ou contraction dyssynchrone du VR et l’un des éléments suivants : rapport du volume de fin de diastole du VR sur la surface corporelle ≥110 ml par mètre carré (patients de sexe masculin) ou ≥100 ml par mètre carré (patients de sexe féminin), ou fraction d’éjection du VR ≤40 %.
      • Critères mineurs: Akinésie ou dyskinésie régionale du VR ou contraction dyssynchrone du VR et l’un des éléments suivants : rapport du volume de fin de diastole du VR sur la surface corporelle 100 à <110 ml par mètre carré (patients de sexe masculin) ou 90 à <100 ml par mètre carré (patients de sexe féminin), ou fraction d’éjection du VR 41 à 45 %.
    • Angiographie du ventricule droit
      • Critères principaux: Akinésie, dyskinésie ou anévrisme régional du ventricule droit.
  • CATÉGORIE 2 : Caractérisation des tissus
    • Critères majeurs: <60% de myocytes résiduels selon l’analyse morphométrique (ou <50%, si estimé) et remplacement fibreux du myocarde à paroi libre du VR, avec ou sans remplacement graisseux du tissu, dans au moins un échantillon de biopsie endomyocardique.
    • Critères mineurs: 60 à 75 % de myocytes résiduels, selon l’analyse morphométrique (ou 50 à 65 %, si estimés) et remplacement fibreux du myocarde à paroi libre du VR, avec ou sans remplacement graisseux du tissu, dans au moins un échantillon de biopsie endomyocardique.
  • CATÉGORIE 3 : Anomalies de la repolarisation
    • Critères principaux: Ondes T inversées dans les dérivations précordiales droites (V1, V2 et V3) ou au-delà chez les patients âgés de plus de 14 ans (en l’absence de bloc de branche droit complet, QRS ≥120 msec).
    • Critères mineurs: Ondes T inversées dans les dérivations V1 et V2 chez les patients âgés de plus de 14 ans (en l’absence de bloc de branche droit complet) ou dans V4, V5 ou V6 ; ondes T inversées dans les dérivations V1, V2, V3 et V4 chez les patients âgés de plus de 14 ans (en présence d’un bloc de branche droit complet).
  • CATÉGORIE 4 : Anomalies de la dépolarisation et de la conduction
    • Critères principaux: Onde d’Epsilon (signaux reproductibles de faible amplitude entre la fin du complexe QRS et le début de l’onde T) dans les dérivations précordiales droites (V1, V2 et V3).
    • Critères mineurs: Potentiels tardifs sur l’ECG à moyenne de signal dans au moins un des trois paramètres en l’absence d’une durée du complexe QRS de ≥110 msec sur l’ECG standard ; durée du complexe QRS filtré, ≥114 msec ; durée du complexe QRS terminal <40 μV (durée du signal de faible amplitude), ≥38 msec ; tension quadratique moyenne du complexe QRS terminal 40 msec, ≤20 μV ; durée d’activation du complexe QRS terminal, ≥55 msec, mesurée du nadir de l’onde S à la fin du complexe QRS, y compris R′, dans V1, V2 ou V3, en l’absence de bloc de branche droit complet.
  • CATÉGORIE 5 : Arythmies
    • Critères principaux: Tachycardie ventriculaire non soutenue ou soutenue avec un bloc de branche gauche et un schéma d’axe supérieur (complexe QRS négatif ou indéterminé dans les dérivations II, III et aVF et complexe QRS positif dans la dérivation aVL).
    • Critères mineurs: Tachycardie ventriculaire non soutenue ou soutenue de la configuration de l’écoulement du VR avec un bloc de branche gauche et un schéma d’axe inférieur (complexe QRS positif dans les dérivations II, III et aVF et complexe QRS négatif dans la dérivation aVL) ou axe inconnu, ou >500 extrasystoles ventriculaires par 24 heures (sur le monitorage Holter).
  • CATÉGORIE 6 : Antécédents familiaux
    • Critères principaux: VRA confirmée chez un parent au premier degré qui répond aux critères actuels du groupe de travail, VRA confirmée pathologiquement à l’autopsie ou à la chirurgie chez un parent au premier degré, ou identification d’une mutation pathogène catégorisée comme associée ou probablement associée à la VRA chez le patient en cours d’évaluation‡.
    • Critères mineurs: Antécédents de VRA chez un parent au premier degré chez qui il n’est pas possible ou pratique de déterminer si les critères actuels du groupe de travail sont remplis, mort subite prématurée (à un âge <35 ans) due à une suspicion de VRA chez un parent au premier degré, ou VRA confirmée pathologiquement ou par les critères actuels du groupe de travail chez un parent au second degré.

Tableau adapté de Marcus etal.

Le diagnostic de cardiomyopathie ventriculaire droite arythmogène (CVDA) est considéré comme certain si le patient répond à deux critères majeurs, à un critère majeur et à deux critères mineurs, ou à quatre critères mineurs de différentes catégories ; le diagnostic est considéré comme limite si le patient répond à un critère majeur et à un critère mineur ou à trois critères mineurs de différentes catégories, et le diagnostic est classé comme possible si le patient répond à un critère majeur ou à deux critères mineurs de différentes catégories. ECG désigne l’électrocardiogramme, PLAX la vue parasternale long-axe, PSAX la vue parasternale court-axe, RV le ventricule droit, et RVOT la voie de sortie du RV.

L’hypokinésie n’est pas incluse dans cette définition ou dans les définitions ultérieures des anomalies régionales du mouvement de la paroi du VR pour les critères modifiés proposés.
Une mutation pathogène est une altération de l’ADN associée à la CVAR qui modifie ou devrait modifier la protéine codée, qui n’est pas observée ou qui est rare dans une grande population témoin non atteinte de la CVAR et qui modifie ou devrait modifier la structure ou la fonction de la protéine ou qui a montré une liaison avec le phénotype de la maladie dans un pedigree concluant (c’est-à-dire un pedigree fournissant des preuves concluantes d’une hérédité mendélienne du phénotype de la maladie).


Traitement de la CVAA

Le traitement de la CVAA est principalement axé sur la prévention de l’arrêt cardiaque soudain. Il n’existe pas d’essais cliniques randomisés et contrôlés pour étayer l’utilisation de médicaments antiarythmiques. Les bêta-bloquants n’ont pas d’effets antiarythmiques mais sont toujours prescrits à la plupart des patients atteints de CVDA en raison de leur capacité à réduire l’effet de la stimulation adrénergique dans le cœur. Un DAI doit être envisagé chez les patients ayant subi une syncope, un dysfonctionnement ventriculaire gauche ou des facteurs de risque d’arrêt cardiaque soudain. L’insuffisance cardiaque droite est prise en charge en tant qu’insuffisance cardiaque avec fraction d’éjection réduite (HFREF).