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Risque à 5 ans d’arythmies ventriculaires menaçant le pronostic vital
5-Year Risk of Life-Threatening Arrhythmic Events
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Le syndrome du QT long (LQTS) est une canalopathie cardiaque héréditaire caractérisée par une repolarisation ventriculaire prolongée, qui prédispose les individus à des arythmies ventriculaires malignes, notamment des torsades de pointes. Cette pathologie est principalement attribuée à des mutations génétiques spécifiques : mutations de perte de fonction dans KCNQ1 (LQT1) et KCNH2 (LQT2), et mutations de gain de fonction dans SCN5A (LQT3). Ces anomalies génétiques perturbent les canaux ioniques cardiaques, entraînant un retard de repolarisation et un risque accru d’événements arythmiques potentiellement mortels.
La pierre angulaire de la prise en charge du LQTS implique des modifications du mode de vie, une pharmacothérapie et, dans les cas à haut risque, l’implantation d’un dispositif. Les bêta-bloquants, en particulier les agents non sélectifs comme le nadolol et le propranolol, sont le traitement de première intention pour réduire le risque d’arythmie pour tous les génotypes du SQTL. Ces médicaments atténuent la stimulation adrénergique, diminuant ainsi la probabilité d’apparition d’une arythmie. Cependant, les bêta-bloquants n’éliminent pas totalement le risque. Chez les patients LQT3, où les arythmies surviennent souvent au repos en raison d’une augmentation tardive du courant sodique, la mexilétine, un inhibiteur du canal sodique, s’est révélée efficace pour raccourcir l’intervalle QT et réduire les événements arythmiques, en fonction de la mutation spécifique présente.
Pour les patients présentant un risque élevé, tels que ceux ayant des antécédents d’arrêt cardiaque, de syncope récurrente malgré un traitement par bêta-bloquant, ou d’intervalles QT nettement prolongés, l’implantation d’un défibrillateur automatique implantable (DAI) est recommandée. Les DAI permettent une intervention immédiate en cas d’arythmie menaçant le pronostic vital, prévenant ainsi la mort cardiaque subite. Les lignes directrices 2015 de la Société européenne de cardiologie (ESC) préconisent l’implantation d’un DAI chez les patients atteints de STLQ à haut risque, en mettant l’accent sur une évaluation complète du risque qui inclut les facteurs génétiques et la durée de l’intervalle QTc.
Stratification du risque et modèle de risque 1-2-3-LQTS
Une stratification précise du risque est essentielle pour guider les décisions thérapeutiques chez les patients atteints de STLQ. Les méthodes d’évaluation traditionnelles se concentrent sur le génotype et l’allongement de l’intervalle QTc. En 2018, Mazzanti et al. ont présenté le modèle de risque 1-2-3-LQTS, un outil validé conçu pour estimer le risque à 5 ans d’événements arythmiques potentiellement mortels chez les personnes atteintes de LQT1, LQT2 et LQT3. Ce modèle a été mis au point à partir d’une cohorte longitudinale monocentrique, puis validé par une cohorte indépendante de 1 689 patients issus du Registre international du LQTS de Rochester (NY), aux États-Unis. L’étude de validation a fait état d’un indice C de 0,69 (IC à 95 % : 0,61-0,77) dans la cohorte de validation, contre un indice C de 0,79 (IC à 95 % : 0,70-0,88) dans la cohorte de découverte. Un seuil de risque à 5 ans de 5 % ou plus, déterminé par l’analyse de la courbe ROC comme l’équilibre optimal pour décider de l’implantation d’un DAI, a donné un nombre nécessaire à traiter (NNT) de neuf (IC à 95 % : 6,3-13,6).
Références
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